5. Et dans les lieux humides :

Au sein des prairies ourlées de petits ruisseaux qui pourraient serpenter depuis plus de mille ans, au bord de l’eau bleue des champs, dorment dans les coins humides une lignée de saules frissonnant sous la brise, savamment taillés, pleurent. La taxonomie de ces arbres étant complexe, aussi nous nous limiterons au genre Salix sp.

Se rappelle-t-on qu’Hippocrate (env. 500 ans av. J.C.) avait découvert les vertus thérapeutiques de son écorce, car il soignait les douleurs de ses malades avec des infusions. Nous savons maintenant que le pouvoir antalgique, est dû à son salicoside, le glucoside de l’alcool salicylique et qu’une seule tasse est à peu près actuellement l’équivalent en aspirine d’une dose d’aspirine (Aspégic) pour nourrisson ! 

Car les métabolites sont les mêmes ! Allez soigner de nos jours des douleurs avec une dose de nourrisson, ce ne serait pas convaincant !

La reine des prés

De son côté, dans les lieux humides ou marécageux, vous trouverez des colonies de reine des prés ou spirée ou ulmaire, se balançant mollement dans les fossés spongieux avec leurs élégantes dentelles spumescentes de petites fleurs nacrées (corymbes). La reine des prés, Spirea ulmaria L. (Rosaceae), spirée, herbe aux abeilles, en allemand: Wiesenkönigin, Wiesengeissbart, en alsacien : Krampfkrüt, Mattekönigin, qui a justement donné la dénomination d’aspirine (« aldéhyde de la spirée ») car au 15ème siècle ses propriétés comme antipyrétique furent mises en évidence.

 Plus tard l’on sut que le principe actif, l’aldéhyde salicylique, était un dérivé de l’acide salicylique. D’ailleurs si vous en froissez ses feuilles, vous sentirez un de ses dérivés volatils, le salicylate de méthyle, d’odeur bien connue. Voilà, une véritable curiosité car ces deux espèces de plantes possèdent le même métabolite actif que l’aspirine, (acide acétylsalicylique): l’acide salicylique. 

 Vous connaissez les propriétés de cette substance, l’une de celles les plus utilisées dans le monde. Ajoutons d’autres activités (antiagrégantes plaquettaires…protection contre l’infarctus). Voici un bel exemple de la preuve a posteriori par la science de l’empirisme traditionnel ! Pour tout ceci, une dénomination royale lui aura été réservée.

 la valériane

Non loin, le nom de la valériane, Valeriana officinalis L., (Caprifoliaceae), en allemand : Baldrianwurzel, Katzenwurzel, en alsacien : Bàldriàn, Katzekrüt, vient de « valere, « je me porte bien ».

Cette herbacée retient notre regard avec ses fleurs blanches ou rosées groupées en inflorescences cymeuses terminales. Son rhizome renferme des séries de principes : sesquiterpènes (acide valérénique…) avec des iridoïdes triesters (valépotriates originaux), une huile essentielle…mais l’on court toujours après ses véritables constituants actifs, comme « tranquillisant mineur », car ce sont des inhibiteurs de la capture de l’acide gamma aminobutyrique (GABA) des terminaisons nerveuses, des relaxants musculaires.

 D’où l’emploi de certaines formes galénique plus intelligemment élaborées. C’est ce que l’on appelle un « totum », où chaque constituant en mélange conduit à un complexe actif, alors que chacun, pris isolément ne l’est pas ! Aristote nous avait rappelé rappelle que « le tout est plus que la somme de ses parties ». Mais les preuves cliniques manquent à l’appel. Dans notre laboratoire (RA), nous avons montré que les valépotriates étaient des nucléophiles fortement cytotoxiques, mutagènes et génotoxiques, mais ces substances se dégradent vite, notamment en milieu liquide pour donner des produits odorants peu agréables mais qui ont la particularité d’attirer les chats !

La prêle

La tige verticale de la prêle, Equisetum arvense L. (Equisetaceae), fait penser à une queue de cheval mais en Alsace à une queue de rat d’où son nom en alsacien : Katzewatel et en allemand : Pferdeschwantzkraut, Zinnkraut.

 Elle se dresse dans les endroits marécageux et aux abords des champs de maïs, et ses rameaux stériles portent aux nœuds des feuilles verticillées caractéristiques. Les prêles sont riches en substances minérales et notamment en silicium sous forme de concrétions d’opaline, dont une partie est soluble. La tradition lui attribue des propriétés diurétiques qui sont tolérées au niveau européen en cas de troubles urinaires, en infusion.

Ce sont sous forme de préparations cosmétiques qu’elle est utilisée pour la prévention de la cellulite par exemple dans des crèmes « tonifiantes »… D’aucuns la supputent « reminéralisante » en cas de problèmes osseux mais rien n’a été prouvé scientifiquement.